Réforme-du-code-du-travail-Focus sur La réforme du code du travail

Selon le gouvernement, ce projet de loi d’habilitation vise à donner plus d’égalité, de liberté et de sécurité, aux salariés comme aux entrepreneurs, en renforçant le dialogue social. Dans un monde du travail en pleine mutation, il tend à faire converger performance sociale et performance économique.

Décryptage :

Tout d’abord, avant même de rentrer dans le vif du sujet vous vous posez certainement la question suivante :

  • Quelle est la date d’entrée en vigueur de ces changements ?

Le nouveau gouvernement souhaitait une réforme rapide. Ainsi dès l’été dernier soit seulement quelques mois après l’élection d’Emmanuel MACRON, le gouvernement par le biais d’ordonnances mettait en place de nouvelles mesures. Le projet final a été présenté le 31 août par Edouard Philippe et la ministre du Travail, Muriel Pénicaud. Le contenu précis des 5 ordonnances portant la réforme du Code du travail est donc publique depuis cette date.

Les textes définitifs ont été adoptés en Conseil des ministres le vendredi 22 septembre 2017. Ils ont ensuite été publiés au Journal Officiel du 23 septembre 2017.

Selon Emmanuel Macron, toutes ces mesures entreront en vigueur au plus tard le 1er janvier 2018. Certaines mesures sont applicables dès le lendemain de la parution des textes au Journal Officiel soit depuis le 23 septembre alors que d’autres devront attendre la parution de décrets d’application pour devenir effectives. Une vingtaine de décrets devraient ainsi paraitre d’ici la fin de l’année.

Maintenant que l’on connaît l’échéance de la mise en place de ces changements, voici  un récapitulatif des nouvelles mesures :

La réforme du Code du travail repose sur 5 ordonnances. Ces textes sont consultables en ligne depuis le 31 août 2017.

Emmanuel Macron et son gouvernement souhaitent réformer le Code du travail en profondeur. Les grands principes seraient conservés. C’est le cas du salaire minimum (Smic), pour la lutte contre les discriminations. Le gouvernement semble également ne pas vouloir toucher à la durée du travail de 35 heures hebdomadaire.

Pour le reste, le Président de la République souhaite accorder une place plus importante à la négociation pour réglementer les relations entre les employeurs et les salariés.

Accords d’entreprises valorisés

La nouvelle réforme valorise l’accord d’entreprise en lui donnant plus de poids dans la négociation de son propre agenda social.

Auparavant: Il existait un principe de primauté de l’accord de branche sur l’accord d’entreprise. En effet, l’accord d’entreprise ne peut pas, en principe, contenir des règles contraires à celles prévues dans l’accord de branche (hormis en matière de temps de travail).

Ce qui est conservé : Dans certaines matières, le contenu de la convention de branche continuera à prévaloir sur l’accord d’entreprise (sauf lorsque celui-ci prévoit des règles plus favorables). Il s’agit notamment des salaires minima hiérarchiques, de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes ou des conditions et des durées de renouvellement de la période d’essai.

Ce qui va changer : Les accords d’entreprise pourront prévoir des règles contraires à la convention de branche, notamment dans les domaines de la formation professionnelle ou des conditions de travail. Les règles prévues dans l’accord d’entreprise remplaceraient alors celles prévues dans l’accord de branche, y compris lorsque ces nouvelles normes seraient moins favorables aux salariés. La négociation entre les délégués syndicaux et l’employeur, définition même de l’accord d’entreprise, pourra prévaloir sur des sujets tels que les primes d’ancienneté ou le 13e mois.

Pour les PME lorsqu’il n’existe pas de syndicat dans une entreprise (ce qui est le cas dans 96 % des PME), les accords d’entreprise sont aujourd’hui négociés par des salariés mandatés par un syndicat. Dans les petites et moyennes entreprises, la réforme prévoit de permettre à un salarié de conclure un accord d’entreprise ; y compris, donc, si ce salarié n’est pas syndiqué.

Ce qui va changer pour les Licenciements:

  • Planchers et Plafonds des indemnités prud’homales et hausse des indemnités légales

Le président Emmanuel Macron souhaite modifier les règles applicables aux indemnités versées aux salariés aux prud’hommes en instaurant un seuil et, surtout, un plafond au montant des indemnités versées aux salariés. La  « contrepartie » selon gouvernement se trouve dans la hausse de 25% des indemnités légales de licenciement.

Auparavant : Le montant des indemnités légales de licenciement était pour un salarié ayant moins de 10 ans d’ancienneté de 1/5e de son salaire par année d’ancienneté.

Ce qui va changer: La procédure de licenciement sans cause réelle et sérieuse va se voir appliquer des règles s’agissant des indemnités versées aux salariés dans le cadre d’une procédure aux prud’hommes. Les mesures instaurent un seuil mais surtout, un plafond au montant des indemnités versées aux salariés. Le plafond de dommages et intérêts sera fixé à un mois de salaire en-dessous d’un an d’ancienneté. Il augmente d’un mois par année jusqu’à 10 ans, puis d’un demi-mois par année. Il ne pourra dépasser 20 mois au-delà de 28 ans d’ancienneté.

Pour les TPE (moins de 11 salariés), le plancher sera fixé à 15 jours à partir d’un an d’ancienneté. Il augmentera progressivement, pour atteindre deux mois et demi à partir de neuf ans d’ancienneté. Dans les autres entreprises, le plancher sera fixé à un mois à partir d’un an d’ancienneté, puis à trois mois à partir de deux ans d’ancienneté. Le barème ne s’appliquera pas pour les cas de « violation d’une liberté fondamentale ». Dans ce cas, l’indemnité ne pourra être inférieure à six mois de salaire.

S’agissant du montant des indemnités légales de licenciement: il passera à un quart au lieu de 1/5eme. Concrètement, cela signifie qu’un salarié touchant 2000 euros par mois et ayant 10 ans d’ancienneté pourra obtenir 5000 euros, contre 4000 euros auparavant.

Cette hausse a été officialisée par le décret n° 2017-1398 du 25 septembre 2017.

Autre mesure favorable aux salariés licenciés : la réforme a également abaissé le seuil d’ancienneté à partir duquel les indemnités sont dues. Il est désormais fixé à 8 mois, contre 1 an auparavant.

  • Des formalités de licenciements assouplies

Le gouvernement souhaite assouplir le régime applicable aux formalités de licenciement.

Actuellement : Lorsque l’employeur commet certaines erreurs de forme au cours de la procédure licenciement, ce dernier peut potentiellement être annulé.

Plusieurs mesures visent ainsi à sécuriser la situation de l’employeur qui souhaite licencier sans bien connaitre les règles de forme applicables.

Ce qui va changer : L’article L. 1235-2 du Code du travail introduira de nouvelles règles afin de limiter les conséquences liées à des irrégularités de procédure.

L’employeur conservera la possibilité de préciser ou de compléter les motifs figurant dans la lettre de licenciement, et ce même après sa notification au salarié. Cette modification pourra se faire à l’initiative de l’employeur ou à la demande du salarié.

Enfin, une autre mesure importante concerne le non-respect de la procédure d’entretien préalable de licenciement par l’employeur. Dans cette situation, le salarié pourra toujours agir en justice, mais la loi prévoira que l’indemnité accordée par le juge ne pourra pas dépasser un mois de salaire.

  • Harmonisation des délais pour contester un licenciement aux prud’hommes

Actuellement : La loi opère une distinction entre le licenciement économique (1 an) et les autres types de licenciement, pour lequel le délai pour agir devant le conseil des prudhommes est de 2 ans.

Ce qui va changer : Le délai pour contester un licenciement aux prud’hommes passera à 1 an pour tous les types de licenciement..

  • Elargissement du champ d’application du Licenciement pour motif économique

Actuellement : Lorsqu’un groupe met en place un plan de licenciement en France, les tribunaux tiennent compte des difficultés de tous ses sites implantés dans le monde.

Ce qui va changer : Le projet de réforme compte instaurer une prise en compte d’un périmètre national pour évaluer les difficultés économiques d’une multinationale, indépendamment des autres sites implantés à l’étranger. La future ordonnance limiterait également l’appréciation des juges au secteur d’activité commun aux entreprises du groupe implantées en France.

Développement de l’utilisation des « CDI de projet »

Le gouvernement souhaite étendre la possibilité de conclure des « CDI de projet ». Ce type de contrat existe déjà dans le BTP sous la forme d’un « CDI de chantier », dont le gouvernement souhaite s’inspirer. Il permet à un employeur d’ajuster la durée du contrat de travail en fonction de l’avancée d’un chantier. Le contrat de projet reprend les règles du CDI classique, mais inclut une clause de chantier par laquelle l’employeur peut licencier le salarié lorsque le projet pour lequel il a été recruté se termine. Le contrat ne prévoit donc pas de date de fin précise.

A la différence du CDD, le contrat de projet ne permet pas au salarié de toucher une prime de précarité.

Selon la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, le gouvernement ne compterait pas généraliser le contrat de projet à toutes les entreprises mais uniquement à certains secteurs d’activité. L’instauration du contrat de projet serait ainsi décidée au niveau de la branche. L’accord de branche devra notamment fixer les contreparties dont pourront bénéficier les salariés en termes de salaires et d’indemnités de licenciement.

Fusion des représentants du personnel pour créer un nouvel organe : Le Comité social et économique

Emmanuel Macron souhaite fusionner le plus possible les organes représentatifs du personnel dans les entreprises au sein d’une instance unique du personnel (IUP).

Actuellement : la délégation unique du personnel permet de regrouper le comité d’entreprise et les délégués du personnel au sein d’une seule instance commune. Seules les entreprises ayant entre 50 et 299 salariés peuvent aujourd’hui la mettre en place.

Ce qui va changer : Cette faculté pourrait être étendue à toutes les entreprises, de manière automatique, en instaurant une instance unique de représentation qui regrouperait à la fois les attributions des délégués du personnel, du comité d’entreprise et du CHSCT, sans limite de plafond. Un accord d’entreprise pourrait toujours décider de maintenir les institutions existantes ou en instaurer de nouvelles.

Ce nouvel organe unique porterait désormais le nom de « comité social et économique » (CSE). Le CSE concentrerait les compétences des trois instances (DP, CE et CHSCT) et pourrait agir en justice. Il pourrait également se voir confier des compétences de négociation relevant habituellement des délégués syndicaux. Concrètement, cette nouvelle mesure devrait ainsi entrainer une baisse des nombres d’élus et d’heures de délégation.

Rupture conventionnelle collective

La réforme compte permettre aux employeurs d’instaurer un dispositif de rupture conventionnelle collective dans l’entreprise. Fixée par un accord négocié avec les syndicats, elle reprendrait l’idée de la rupture conventionnelle individuelle actuellement en vigueur : elle concernerait donc uniquement les départs volontaires et se ferait sous le contrôle de l’administration. Le montant des indemnités versées aux salariés serait fixé dans l’accord d’entreprise.

Cette mesure vise notamment à mieux encadrer les plans de départs volontaires, qui étaient surtout régis par la jurisprudence jusqu’à maintenant.

CDD et intérim

Actuellement : Les conditions du recours à aux CDD et à l’intérim sont régies par la loi.

Ce qui va changer : Le projet vise à permettre d’assouplir les règles applicables aux CDD et à l’intérim. Un certain nombre d’éléments notamment les conditions liées à la durée de ces contrats, à leur nombre de renouvellements possibles ou à leur délai de carence pourront désormais être fixées au niveau de la branche. Si aucun accord ou aucune convention de branche ne prévoit de règles particulières sur ces questions, ce sera la loi qui s’appliquera.

Travail le dimanche

Le projet de loi d’habilitation contient également des mesures visant à favoriser l’ouverture des magasins le dimanche. Le texte prévoit de faciliter l’abrogation des arrêtés préfectoraux de fermeture d’établissement pour repos dominical. Il est également prévu d’augmenter le délai accordé aux commerces situés dans une zone touristique ou commerciale pour conclure un accord sur le travail le dimanche (la loi Macron de 2015 leur avait accordé 2 ans).

Fusion de l’apprentissage et l’alternance sans condition d’âge

Macron souhaite fusionner le contrat d’apprentissage et le contrat d’alternance pour en faire un seul contrat unique. Il n’existerait plus de condition d’âge maximal.

Travail de nuit

Les règles applicables au travail de nuit pourraient également être assouplies. Les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord pourraient ainsi modifier marginalement les heures de début et de fin des horaires légaux du travail de nuit, afin d’éviter un « basculement » en horaires de nuit pour les salariés amenés à finir le travail tard ou à le commencer très tôt.

Compte pénibilité:

La réforme du travail devrait également comporter un volet sur le compte pénibilité, qui permet aux salariés exposés à des facteurs de pénibilité au travail d’acquérir des droits, notamment en matière de retraite et de formation. Le gouvernement souhaite simplifier ce dispositif, dont la mise en œuvre dans les entreprises est jugée beaucoup trop complexe par le patronat.

Actuellement : le compte pénibilité comporte 10 critères à savoir :

Ce qui va changer : 4 critères devraient sortir du compte à points. Il s’agit de la manutention de charges lourdes, des postures pénibles, des vibrations mécaniques et des risques chimiques. Les salariés exposés à ces risques pourront toutefois encore bénéficier d’un départ anticipé à la retraite, mais seulement sous certaines conditions.

Télétravail:

Actuellement : le télétravail doit être mentionné dans le contrat de travail du salarié ou faire l’objet d’un avenant au contrat de travail. De plus, la prise en charge des accidents du travail faisait l’objet d’un régime spécial.

Ce qui va changer : Désormais, un accord collectif peut définir les règles applicables au télétravail dans l’entreprise. A défaut, une charte pourra être élaborée par l’employeur après avoir recueilli l’avis du comité social et économique s’il en existe un dans l’entreprise. Enfin, le régime juridique du télétravail est désormais mieux encadré. Diverses mesures visant à le sécuriser sont mises en œuvre. La principale concerne les accidents du travail, dont les conditions de prise en charge s’alignent sur celles des accidents survenant dans les locaux de l’entreprise.

Contrôles : instauration d’un « droit à l’erreur »

Emmanuel Macron compte également mettre en place un « droit à l’erreur » en faveur des employeurs lorsque ceux-ci sont contrôlés par l’administration (et notamment l’Urssaf). Il s’agit d’un principe selon lequel l’entreprise ne sera normalement pas sanctionnée lors d’un premier contrôle dès lors qu’il est relevé un manquement non-intentionnel de sa part.

Toujours en matière de contrôles, le Président souhaite également développer les campagnes de testing afin de renforcer la lutte contre les discriminations, notamment en matière d’embauche.

Démission et chômage

D’autres mesures toucheront les salariés dans le cadre de la réforme de l’assurance chômage à venir en 2018. L’une concerne les indemnités chômage versées aux salariés démissionnaires. Afin de favoriser la mobilité, les salariés qui démissionnent pourraient ainsi avoir droit aux allocations chômage une fois tous les 5 ans, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui (sauf cas de démission légitime).

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